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LE NOIR Muriel Robin
«Patricia, Patricia, ça fait un quart d'heure que tu me parles de ce Félix... J'ai très bien compris où tu veux en venir : je suis ta mère, je t' connais... comme si je t'avais faite et, tu veux savoir si je suis d'accord pour que tu le fréquentes... Pour que tu ? L'épouses ? ! Deux secondes... (Elle se retourne et pleure). Patricia, je ne te cache pas vé té qué se va tu frouchu, excuse-moi... excuse-moi, pour l'instant, je te livre les mots un petit peu comme ils arrivent... Je le connais ? Je ne le connais pas... Ton père le connaît ? Non plus ! Personne ne le connaît finalement... Oui, je t'avoue que je suis un peu surprise, c'est vrai. J'ai besoin de m'habituer à cette idée et si tu le veux bien, on va en rester là, j'aimerais en parler avec ton père...
Un problème ? ! Ca ne vient pas de nous, j'espère ? Alors, quel problème ? Il est..... (Elle pleure)... noir ? ! Deux secondes (elle se retourne à nouveau et pleure) Mais tu en es sûre ? ! Je te fais confiance ! ... Si ça me gêne ? Alors là pas du flou... pas du plou... pas du flouchlouplou, s'il est noir, c'est qu'il a de bonnes raisons de l'être... Mais dis-moi un petit peu, il est noir noir noir ou noir un peu... un peu blanc ? Ah ! , Noir noir, ah ! Complètement noir..... Oui... on n'est pas dans la MERDE... Mais tu as tout à fait le droit d'épouser un nègre, alors là, on n'est pas des parents... Pardon ? J'ai dit « nègre » ? Oh ! Ça m'étonnerait que j'aie dit un truc comme ça... J'ai dû faire un lapsus, j'en parlais encore à midi avec ton père, et je lui disais : « Y a beaucoup trop de blancs dans la famille... » des blancs, toujours des blancs, moi je ne peux plus les voir ces blancs. Je le dis tous les jours « vive les noirs » Et alors les..., les parents de cet homme de couleur, ils sont noirs ? Et oui, eux aussi... mais, ils le savent ? Que leur fils épouse une blanche ? Ils sont plutôt contents ? Tu penses... oh ! Détrompe-toi, détrompe-toi, Patricia, je cache ma joie... D'ailleurs, si tu le veux bien, j'aimerais aller dans la cuisine pour fêter l'événement avec ton père...
La date des noces ? Oh ! , On en est peut être pas encore là ? Si ? Vous avez arrêté une date, ah ! Bon, c'est différent, c'est différent bien sûr... et alors, c'est quand est-ce prévu pour ? Demain ! Tu peux me prendre en photo, s'il te plaît... Ben disons que ça fait pas mal de nouvelles d'un coup quand même. Alors comment tu penses faire, avec ton père, on est invité, on vient, on ne vient pas, comment sa va fonctionner ? Moi personnellement demain après-midi, je peux, je n'ai rien à faire...
Mais j'pense à un petit détail, si je peux m'permettre : Tous ces noirs d'un coup, d'un seul, t'as pas peur que ça fasse un peu deuil pour un mariage, toi ? Non. Bien, alors, et ça va être quoi ton nouveau nom, ma chérie ? Ah ! En plus ! Bien, je peux retourner dans ma frisine ? Alors à ton père, qu'on soit bien d'accord, je lui dis que demain tu épouses un noir qui s'appelle Félix Le chat... Tu peux me rappeler où est ma cuisine s'il te plaît ? Ah je l'ai « reconnute » ! (elle se retourne et essaie d'aller avec tant bien que mal dans sa cuisine )
Autre chose ? Mais j'arrive ! (elle revient )
On pourrait peut-être en garder un petit peu pour demain ? Non, c'est important ? ! Ca ne t'ennuie pas que je m'assoie par terre ? Je t'écoute... Il est de Bouakémadoua ? Ca ce n'est pas bien grave... Je te cache pas que j'avais un petit peu peur que tu m'en files une autre sur le... Tu pars t'installer dans son village? Je vais peut être m'allonger cinq minutes moi quand même...»
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